myriam
Messages : 351 Localisation : Vosges
| Sujet: Frédéric Lenoir : dialogue bouddhisme / christianisme Mar 25 Nov 2014 - 17:43 | |
| Voici un extrait d'une petite étude de Frédéric Lenoir sur les différences et les convergences entre christianisme et bouddhisme . Nous sommes nombreux, je le sais, à réfléchir parfois à ce sujet, alors voilà de quoi alimenter la réflexion. - Férdéric Lenoir a écrit:
Feu & Lumière.
J’ai organisé l’année dernière plusieurs rencontres inédites entre un lama tibétain et un père abbé bénédictin, qui a donné lieu à un livre à deux voix sur le chemin spirituel dans le bouddhisme et dans le christianisme.1 Cet échange chaleureux et enrichissant m’a permis de me faire une opinion plus précise sur ce qui rapproche et sépare ces deux grandes voies spirituelles.
Les préjugés et les visions caricaturales présentent dans bien des esprits, tendent en effet à entretenir l’idée dominante d’une différence radicale entre ces deux traditions. Il existe effectivement, et nous y reviendrons, certaines divergences profondes. Mais, comme l’a montré ce dialogue, les points d’accord sont beaucoup plus nombreux qu’on ne le pense communément. Je retiendrai cinq grands pôles de convergences.
Le premier concerne la situation existentielle de l’homme : de part et d’autre on considère cette vie comme décisive, avec un enjeu majeur : celui du salut ou de la libération à obtenir et pour lequel l’homme est invité à consacrer d’importants efforts. La mort est également considérée comme un moment crucial, auquel l’homme doit se préparer, un passage vers un autre mode d’existence, laquelle est conditionnée par les actes posée en cette vie. Même si certaines divergences se font jour quant aux différents modes d’existence de cette vie future, on retrouve dans les deux traditions les notions d’états bienheureux et d’états malheureux, avec la possibilité d’accéder de manière ultime à un état de suprême béatitude au delà de toute représentation et de tous mots (nirvana ou vision béatifique).
Le deuxième pôle de convergence, le plus important, concerne le chemin spirituel et plus précisément les dispositions intérieures nécessaire à l’homme pour atteindre ce salut ou cette libération. Le Moine et le Lama s’accordent ainsi sur la nécessité de libérer l’esprit des nombreuses agitations et distractions pour créer un véritable « espace intérieur ».
Sur l’utilité de la pratique de la méditation pour créer ce silence intérieure et les conditions d’une prise de recul, d’une distanciation par rapport à tous ce qui nous perturbe.
Sur la nécessité d’ouvrir son cœur à l’Absolu, de développer un état d’abandon, de confiance, de lâcher prise.
Sur le caractère décisif de l’intention altruiste dans toute pratique spirituelle, cette motivation aimante qui vise à agrandir son cœur aux dimensions de l’univers, à refuser d’être heureux sans les autres, à mettre, en fin de compte, l’amour et la compassion comme source et but suprême de toute activité spirituelle.
Dans cette perspective, l’orgueil, la suffisance, le repli sur soi au détriment des autres, sont perçus de part est d’autre comme les principaux obstacles à la réalisation spirituelle. On insiste par contre avec force sur la nécessité d’une « reliaison » avec un principe supérieur capable d’aider l’homme à grandir et à se dépasser.
Cette notion d’influence spirituelle, de grâce, est bien au cœur du christianisme comme du bouddhisme du Grand véhicule. Cela réduit considérablement l’écart entre une conception du christianisme où le salut ne relèverait que de la grâce et une conception limitée du bouddhisme, où le chemin spirituel ne reposerait que sur les seuls efforts de l’homme, sans aucune médiation et appel à un soutien spirituel extérieur.
L’écart demeure évidemment sur l’origine ultime de grâce : le don de la vie divine du Créateur d’un côté, l’influence positive des êtres « éveillés » et un processus d’identification à leurs qualités, de l’autre.
Le discours tenu par le Moine et le Lama sur ce que la tradition chrétienne appelle « les passions » et le bouddhisme « les émotions » est aussi très similaire. L’idée maîtresse est de ne pas réprimer, de ne pas refouler ces passion ou ces émotions, mais de les reconnaître, de les identifier et de faire un travail spirituel qui permet de les transformer (ce qui rejoint le concept freudien de sublimation). On retrouve enfin une conception très similaire de bonheur, de la manière dont il doit être recherché sans constituer un absolu en cette vie, ainsi que de la souffrance qui ne doit jamais être recherché pour elle même, mais qui, vécue d’une certaine manière – ici les conceptions pourront diverger fortement – peut servir de tremplin à un progrès spirituel.
Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] | |
|